La vie des antilopes #AS.4

L’antilope sauvage est un animal subversif. « Allons bon », me direz-vous, « qu’est-ce qu’il va encore inventer ce pseudo vulgarisateur scientifique plus siphonné qu’un vase communicant? » Eh bien observez, vous répondrai-je. Tout d’abord, la construction du patronyme de l’antilope. Déjà on a « lope » qui rime avec des mots peu élégants (escalope, nyctalope…) et surtout « anti », qui exprime une opposition. En clair, les antilopes sont des contestataires. Contestataires de quoi, me direz-vous ? Regardez-les, ces gourgandines effarouchées, comme elles détournent les talons avec mépris lorsque de sympathiques lions de passage les complimentent sur leur nature exquise, leur expriment galamment combien ils les trouvent à croquer et apprécieraient dîner avec elles. Jamais un merci, un « pourquoi pas? », ni même un petit rougissement de courtoisie, non, toujours elles s’enfuient, l’air effrayées, affolées, comme si ces braves lions étaient animés de mauvaises intentions — alors qu’ils n’aspirent qu’à tailler une bavette autour d’une bonne entrecôte, what else ?

Mais il y a pire ! Les antilopes sont persifleuses : on les voit régulièrement fréquenter des gazelles, friandes des jeux galants de la séduction. Eh bien on ne sait pas ce qu’elles se racontent, mais lorsque les antilopes s’enfuient après avoir vu un lion, les gazelles les suivent au grand galop ! Ah, la vie est dure pour ces pauvres lions qui aiment tant nouer contact avec les autres espèces… Qu’on se le dise, qui espère séduire l’antilope devra se faire pousser des cornes ! Et ça, c’est pas drôle.

 lion 3

♪ Janis Joplin : Kozmic Blues

La vie des tigres #AS.3

Le tigre du Bengale est un animal subversif. De quelle preuve je dispose ? Très facile : il est de notoriété commune que les rayures amincissent, mais uniquement quand elles sont portées dans le sens de la longueur. Or, les tigres les portent dans le sens de la largeur : si ça ce n’est pas de l’anti-conformisme à l’état pur ! Je poursuis ? Bien. On applaudit ces gros matous lorsqu’ils sautent à travers des cercles enflammés au cirque… mais le feu, ça fait partie de leur nature ! Le feu de Bengale, j’invente rien ! Alors, ils se fichent pas un peu de nous ?

Bon, d’accord, j’exagère peut-être un peu. M’enfin, que ces mecs-là arrivent à copiner avec des bouffeurs de miel et des jambons ambulants, je n’y crois qu’à moitié. La vérité, ces animaux sont dangereux ! La prochaine fois que vous irez les voir chez Pinder, Amar et compagnie, repensez-y après qu’ils vous aient puni d’être au premier rang en vous pissant dessus. Vous voyez, si ça c’est pas de la cruauté ! Donc quand des mecs de la WWF ou de la CITES vous abordent dans la rue pour vous proposer un abonnement, dites leur bien en face que les seuls tigres acceptables sur la planète c’est les peluches que vous offrait Tata Huguette quand vous aviez six ans ! Et rien d’autre ! Voilà, terminé pour aujourd’hui, au prochain article nous verrons comment faire fondre la banquise au sèche-cheveux pour niquer les ours polaires.

♪ Django Django : Default

La vie des crevettes #AS.2

La crevette est un animal subversif. Elle cache sa perversion derrière son adorable couleur rose, sucrée comme un museau de porcelet, comme ces chamallows que l’on grille volontiers sur le feu de camp l’été dans la montagne. Mais il ne faut pas se leurrer. D’abord, pas de montagne là où vivent les crevettes, donc oubliez les chamallows. Ensuite, crevette vient du latin « crevus« , qui signifie crever. Tout comme sa grand-mère l’écrevisse, la crevette est un animal funeste, tout au moins maladif.

Mais surtout, et c’est là toute sa dangerosité, la crevette a l’arme de la compassion. Contrairement aux écrevisses, crabes, homards et langoustines qui ont de grosses pinces, symbole d’avarice, la crevette est faible, nue, miséreuse, presque généreuse par son absence de défense digne de ce nom, ses yeux noirs vides d’émotion vous lorgnant avec pitié. Mais ne vous y fiez pas. Au contraire, mangez-la, ô cruels crustacivores, mangez-la toute ! Et peut-être, à l’intérieur, prendrez-vous un peu de sa couleur, sa couleur de bonbon, comme les flamants roses

♪ Camille Saint-Saëns : Aquarium

La vie des loutres #AS.1

La loutre de mer est un animal subversif. Les poissons la détestent (en même temps elle les mange) et les otaries en sont jalouses parce que, n’ayant pas de jambes, elles se font toujours battre au 110 mètres haies lors des olympiades arctiques. C’est pourquoi les eskimos voient souvent arriver devant la porte de leur igloo des boy-scouts à branchies tenter de leur vendre des posters ou des pins anti-loutres.

Néanmoins, les principales concernées s’en tapent : elles ont récemment gagné un petit pécule à la loterie de Reikjavik, et en ont profité pour s’acheter un baby-foot et une table de ping pong.

Aussi, on s’amuse bien chez les loutres de mer. Du coup les poissons les détestent encore plus, mais comme les loutres jouent au baby-foot et au ping pong et s’offrent des festins de fruits de mer aussi énormes qu’un champion sumotori, le train des injures poissonnières roule sur le rail de leur indifférence.

♪ Boris Vian : Je bois